mardi 7 décembre 2010

Du temps que j'travaillais su'a track....

Du temps que j'travaillais su'a track j'ai côtoyé toute sorte de monde: des bons gars, des osties d'lâches, des fait-ben, des licheux d'boss, des mémères, des gars fiab; mais des fifs, jamais! Du moins pas au début.

Difficile de pas aborder le sujet. On travaillait 10 jours d'affilée su'a track et, dans les premières années, on couchait 2 gars par chambre. Dépendamment des équipes on travaillait ensemble, on mangeait ensemble, on jouait au pool ou au ping-pong ensemble, on regardait les games de hockey ensemble, on partageait les mêmes douches les mêmes toilettes. Pas de véritable intimité.

Comme la majorité des travailleurs venait de mon village ou de la région j'avais pas à m'inquiéter: "les fifs ça vient d'en déhors" qu'on disait. Ça fait que quand un nouveau arrivait pis qu'y disait v'nir de Montréal ou d'la côte sud ben on y demandait toujours si y'était marié ou si y'avait une blonde. Anyway les étrangers étaient toujours suspects les premiers temps.

Pis un beau jour, j'me suis ramassé dans un camp où l'un des cuisiniers de la Crawley s'affichait ouvertement comme un homosexuel. Le matin il nous accueillait par des "Pis mon beau, c'est quoi que j'te sers à matin". Moi ça'm faisait rire pis ça'm mettait de bonne humeur mais y avait des gars qui aimaient pas ça pis qui chiâlait à la direction de la compagnie pour le faire clairer. J'ai pas voulu embarquer: c'était un ostie d'bon cook par rapport aux autres bouilleux qui nous faisaient à manger. Tant qu'à moé y avait beau coucher avec qui y voulait. Mais bon, c'est vrai qu'au début qu'être homo c'était mal vu pis qu'le gars risquait de trouver le temps long longtemps.

Peu à peu, des travailleurs se mirent à afficher ouvertement leur homosexualité. Parmi eux, plusieurs avec qui je m'entendais bien. Les temps changeaient. Moi aussi. J'allais être père. J'avais pu envie de c'te vie-là. J'avais envie d'être à la maison à tous les soirs.

Moi et J-M jouant aux tapettes dans le canyon

6 commentaires:

manouche a dit…

Que c'est bon de rencontrer des gars "fiab"!

Barbe blanche a dit…

Les gars de la place, y sont ben fiables, mais le jour où ils annoncent leur différence;
c'est quoi la différence d'avec le gars fiable de la veille, il est moins fin, il est plus dangereux,on le connais plus, il a tellement changé en une fraction de seconde.
Comme tu le dis si bien:" Tant qu'à moé y avait beau coucher avec qui y voulait"
Si tout le monde comprenait ça, la face de la terre serait différente...

Gomeux a dit…

Je pense pas te l'avoir dit mais, j'adore tes histoires du temps.
Et les photos me rappelles celle de mon père, du temps qui travaillait dins chantiers, genre la QNS.

gaétan a dit…

:-)

Zoreilles a dit…

Ces billets de ta série « su'a track » me font replonger dans un passé pas si lointain, un monde d'hommes, celui des pionniers des villes minières, des bunkhouses, de la Crawley mequ'on creuve, des gars de run, des bâtisseurs de barrages et de pays, c'était un peu pareil partout, il me semble réentendre mon père, et Crocodile Dundee qui a beaucoup travaillé dans le Nord aussi, baie James, Terre de Baffin.

C'est un univers riche qui n'a pas été raconté souvent.

Bravo!

Quant à l'homosexualité, on sent ton acceptation inconditionnelle des personnes qui ont cette orientation, ton évolution, mais il y a des mots qui sont encore chargés de beaucoup de mépris, fifs et tapettes sont parmi ceux-là. Ça reste difficile à entendre.

gaétan a dit…

Zoreilles tu as raison quant à l'utilisation du mot tapette dans le haut de la photo. Geste gratuit et plus provocateur que porteur de mépris.
Pour les utilisations de ce terme dans le texte il évolue comme le narrateur... :-)

Changement de sujet... j'imagine que tu lis parfois le site de nouvelles régionales de r-c et chaque fois qu'il est question de mines et de Richard Desjardins le gars se fait malmené par des propos qui frise la haine. Me retiens chaque fois pour pas écrire des bêtises à ces imbéciles qui lui prête des intentions qu'il n'a pas. Encore dernièrement....