mardi 7 octobre 2008

Un dernier avant de passer à autre chose

La chute à Philomène
Il ne se passe jamais rien à Saint-Alexandre-les-Becquets. La plupart du temps, l'activité principale consiste à regarder courir l'unique chien du village. Et encore, ce cabot est tellement stupide qu'il trébuche partout.
Cet été-là, quand le gars du Ministère de la voirie a entrepris ses nombreuses visites au village, les habitants étaient impatients d'en connaître le motif. Dès la deuxième visite de l'étranger venu prendre son café matinal, la vieille serveuse du casse-croûte s'avança:
-Alors, mon beau jeune homme de la ville, qu'est ce qui t'amène de par che-nous?
-C'est confidentiel pour le moment, madame. Peut-être que plus tard..., répondit le gars de la voirie, trop heureux de la faire languir, elle et les autres clients qui avaient cessé de manger et de parler pour entendre sa réponse.
Il n'en fallait pas plus. La machine à rumeurs s'emballa.
-Il vient pour le tracé d'une nouvelle route, disait Onésime Pelletier, confiant.
-C'est pour rénover le pont couvert qui traverse le village, affirmait Paul-Émile Bordages, d'un ton encore plus convaincant.
Le maire Tremblay, lui, embêté, faisait celui qui savait mais qui ne pouvait pas parler. Et comme le bonhomme Tremblay avait la tête dure, il était inutile d'essayer de lui tirer les vers du nez.
Un bon matin, Tancrède Vallée, l'homme d'affaires du village, affirma sur le perron de l'église qu'il s'agissait bien de la construction d'une nouvelle route et qu'elle se poursuivrait jusqu'à la chute à Philomène. Apparemment, il y aurait là-bas une usine d'eau potable à exploiter.
Dès le lendemain, tous les habitants se mirent à rénover leurs maisons, à vider leurs remises, à nettoyer leurs terrains. Les pancartes ''à vendre'' et chambres à louer'' apparurent.
Moi je riais. À part le gars de la voirie personne d'autre ne venait à Saint-Alexandre-les-Becquets. J'étais le seul à savoir ce qui l'amenait au village. Il venait ici pour rencontrer mademoiselle Rivard notre prof. de français en quatrième année. Ils se donnaient rendez-vous près du ruisseau derrière l'école. Ils mangeaient sur une couverture, puis ils se baignaient tout nus sous la chute à Philomène. Ensuite ils retournaient sur la couverture et là, ils faisaient des choses... Moi je regardais: c'était bien plus intéressant que d'observer le stupide clébard du village qui trébuchait partout.
:-)par moi-même:-)
en 2001

7 commentaires:

Gomeux a dit…

Hihi!
Ça ressemble pas mal au monde du Lac-Pitte ça.

Mek a dit…

:0)

gaétan a dit…

:-) ma femme vient du coin...:-)

Anonyme a dit…

Bin oui... Lac Pitre, Saint-Alexandre-des-Lacs, la chute à Philomène dans le bout non entretenu du rang 3 (St-Louis)...

C'est tellement connu comme endroit! :-)

Rien empèche qu'on sedemande tout le temps comment il se fait que les "colons" du temps se sont installés si haut, dans cette montagne. Me semble que le bas de la côte aurait été plus accessible. Surtout l'hiver!

Gomeux a dit…

Y avait un moulin.
C'est tout ce que ça prenait.

Zoreilles a dit…

Ah que j'ai aimé lire ce billet!

Savoureux...

Ailleurs, il y a les îles mouk mouk, une par lac au moins. Chez nous, quand on dit d'un couple qu'ils sont partis à l'île mouk mouk, on sait qu'ils passent de bien beaux moments...

gaétan a dit…

:-)