vendredi 22 février 2008

Québec la sale

La lumière jaunit. Le contingent s'interroge, le flot hésite. Devinant le dénouement, une auto accélère, s'y risque. Elle l'a échappée belle. Les cercles rouges s'affichent avec célérité d'abord, avec autorité ensuite. L'interdiction d'avancer conclut une entente avec l'obligation d'arrêter. Des véhicules freinent, frustrés de l'échec de leur mission. Le flux métropolitain est interrompu.
Sourire devant ces prisonniers de la voie urbaine cannibalesque, ces otages des feux désynchronisés. Quelques atrophiés de l'âme achètent la paix sociale aux laveurs de pare-brise à coup d'écu. D'autres, les yeux globuleux, presque sortis de leurs orbites, se défoulent de leur trop vide émotionnel, vocifèrent des insanités, crient de ne pas toucher au symbole de l'accomplissement de leur vie.
À travers un pare-brise, un album de photos. Impression de déjà-vu. Sur la couverture, le carré d'Youville. En arrière-plan la rue d'Auteuil menace de souvenirs douloureux une adolescence baptisée par des queues graissées de marde.
Je crache sur la vitre de l'auto devant moi et ce n'est pas pour la nettoyer. Le type se fâche, s'égosille, s'époumone, hurle sa haine du monde. Peine perdue. Rugissements étouffés because le tintamarre de klaxons. Pas de temps à perdre. La lumière est verte. La calvacade reprend. Les autos s'éloignent mais mon souvenir, lui, s'attarde.

11 commentaires:

da Bitch a dit…

ouf! c'était merveilleux!

gaétan a dit…

Merci da bitch.

Caro et cie a dit…

J'aime beaucoup ce que vous écrivez... Très imagé, coloré, comme si nous y étions et ressentions... ;-)

gaétan a dit…

Merci Caro, l'écriture pour moi c'est une autre forme de voyage.

Mamzell_McJ a dit…

pourquoi j'ai l'impression de ne pas avoir trop bien compris ? :-(

gaétan a dit…

Chais pas. ;-(
Squeegee au centre-ville à l'heure de pointe.... le reste t'en fais ce que tu veux.

Mamzell_McJ a dit…

oh! là ça prend vraiment tout son sens... Merci, j'avais pas saisi.

da Bitch a dit…

j'suis r'venue le lire...

Anonyme a dit…

Curieuse cette haine anti-voitures qui ressemble à cet amour inconditonnel de ces mêmes voitures.

Cracher sur un pare-brise, au visage de quelqu'un, sur son manteau ou son chien, quelle différence? C'est un geste violent et la réponse à un geste violent ne peut qu'être violente.

Mais le récit est formidable. Bravo!

Accent Grave

Unknown a dit…

Oh! Wow! Bien ficelé celui-là encore msieur! Merci Gaétan des cours voyages, le billet pris au hasard comme ça, et qui oublie parfois aussi de nous ramener, c'est bien notre faute.

Mek a dit…

Je partage la même haine des voitures. Ne me dites pas qu'il est radical d'envisager un monde sans voitures. C'est l'idée de recouvrir le globe de ces merdes, en moins de 50 ans, après 1.5 millions d'années sans elles, qui est radicale.

L'élimination complète de l'automobile est une idée raisonnable. Et la haine de ses effets néfastes est une réaction saine.