mercredi 25 décembre 2013

En différé Jour 54

L'officier de la poterne refuse de laisser passer le petit matin glacial et sombre qui m'accompagne. Non, non , non et non.  Rien de l'extérieur. Pas de produits du tabac, pas de cellulaire pis pas de petit matin surtout glacial et sombre. Cé pas bon pour les caméras. Allez hop!  Montre, clés, ceinture, métal, sac à lunch au scanner. Touétou au détecteur. S'pa un moulin icitte.
De l'armoire à balai commence la routine de mes déplacements convenus d'avance ne pas en déroger sous peine d'interrogatoire de corridor embouffeté de grille en corridor embouffeté de grille ici l'improvisation est retenue en otage par les capos de la sécurité les mouchards trônent faire attention chercher sous les fenêtres haut perchées l'entrée sans effraction du soleil délinquant de  Prévert qui se répand ici et là   sur mon passage pas assez longtermps à mon goût vivement que bascule le solstice hivernal pour plus  de lumière dans mon tunnel



samedi 7 décembre 2013

L'inévitable inévitable

L'ambulancier, aidé de sa coéquipière,  s'apprêtait à descendre du reculons l'escalier de la galerie de la maison familial en tenant un genre de fauteuil sur lequel ma mère était attachée quand je lui ai demandé si je pouvais l'aider d'une quelconque  façon. Il était 3 heures du matin et la neige avait recouvert de quelques centimètres  la couverture de la civière au pied de la galerie.
-S.V.P monsieur pouvez-vous vous tenir derrière moi et mettre votre main dans mon dos pendant que je recule dans les marches.
Mon père m'avait téléphoné quelques instants plus tôt me demandant de passer à la maison parce que ma mère ne "filait" pas. Je m'y suis rendu et j'ai ben vu que ça n'allait pas pantoute. J'ai fait le 911.
Mes parents ont 84 ans et ils ont toujours rejeté l'idée de se faire "placer" préférant demeurer dans leur maison malgré leur état de santé chancelante et nos demandes à moi, mon frère et mes soeurs. Alors ces dernières années moi et mon frère on s'occupait de l'entretien de la cour et de la maison et mes soeurs des rendez-vous chez les médecins et de leur confort en général.
Ça fait qu'au lieu d'aller regarder à tous les samedis soirs la Soirée canadienne à la tv avec eux comme à l'habitude , depuis un mois je passe mes après-midi du samedi et du dimanche à l'hôpital à regarder s'élever les échafaudages de l'inévitable fin de vie de ma mère. Comme si raconter tout ça sur le ton de l'autofiction adoucirait  ma  réalité des dernières semaines. Piètre tentative.

mardi 3 décembre 2013

Pause au Napalm - Keith Kouna




Dans les frais bocages
Et les herbes tendres
Tes lèvres en bataille
Et le vent qui brode ses danses
En fines cascades
Sur tes berges blanches

Toucher tes étoiles
Du bout de la langue
Le cœur en cavale
Sous les palmiers de tes hanches
Déchirer la voile
Effeuiller le temps

Perdre les pédales
Déserter les rangs
Semer la pagaille
Et sauter dans un toboggan
Quitter la parade
Bousiller ses chances
Danser sur la table
Dans le théâtre qui flambe

Déposées mes armes
Baissées mes défenses
Les crocs de tes charmes
Mordent les os de mes jambes
Mes chairs en otage
Et les neiges tombent

Caché dans l'étable
À lécher le sang
Battre la campagne
Et laisser macérer le temps
Déchirer la page
Retrouver le monde

Bouffer le cheval
S'arracher le ventre
Entrer dans le bal
Et pousser son chien dans la danse
Ramper dans la vase
Ou dans l'excellence
Reprendre la valse
Dans le théâtre qui flambe




Comme un long matin
Où tout recommence
Les mêmes chemins
Et les mêmes numéros de chambres
Les mêmes refrains
Les mêmes silences

Au milieu du bar
Au milieu des danses
J'ouvre ma fenêtre
Et je contemple ton absence
Balafré de toi
Brûlé à l'essence
Tes restes en image
En sirotant mes vagues à l'encre
Un autre désastre
Une autre avalanche
Une autre rengaine derrière les barreaux de mes manques
Mes rêves minables
Mes châteaux de sable
Et mes sentinelles qui tirent sur tout ce qui m'évade

Vodka sur le tard
Vodka qui fait mal
Comme un goût de fer
Comme un postillon de cadavre
Chercher la bataille
Chercher le mirage
Chercher ton fantôme au milieu des ombres qui passent
Plus rien dans les veines
Plus rien dans le ventre
Que des bouts de peine
Et ton cœur qui frappe mes tempes
Comme un végétal
Une loque qui tangue
Je vague en épave
Dans le théâtre qui flambe